Manuela a obtenu une belle promotion, mais estime que c’est grâce à un concours de circonstances. Éric a signé un important contrat, mais se répète que ses relations ont joué plus que ses qualités de négociateur. Sarah a décroché le premier prix d’un concours pour sa start-up, mais est persuadée que d’autres projets méritaient davantage cette récompense. « Le syndrome de l'imposteur touche des personnes qui réussissent de manière évidente, mais qui sont dans l’incapacité de s’attribuer leurs succès, analyse le psychologue Kévin Chassangre, co-auteur de
Traiter la dépréciation de soi. Le syndrome de l’imposteur (Dunod). Elles pensent que si elles en sont arrivées là, c'est par malentendu ou par hasard, mais jamais grâce à leurs qualités propres. Ces "imposteurs" vivent dans la peur d'être démasqués malgré des signes objectifs de réussite. Ils ont l’impression de tromper les autres, d’être surestimés. Ils ont tendance à s’auto-dévaluer, à surestimer les facteurs exogènes de leurs succès, à minimiser leurs réalisations ou encore à redouter l’échec. »
Ainsi, réussite professionnelle ne rime pas toujours avec satisfaction personnelle. « Ce complexe constitue une forme exacerbée, voire toxique, de la conscience professionnelle, ajoute la coach Virginie Boutin, co-fondatrice de
Bloom’R, un site pour aider chacun à trouver un métier épanouissant. Il est ressenti par des personnes souvent très exigeantes avec elles-mêmes, qui se préoccupent beaucoup de la qualité de leur travail. » Leur quotidien ? Beaucoup d’anxiété et d’insécurité, un faible sentiment d’efficacité et une insatisfaction chronique. Voici cinq conseils pour en sortir.
1° Faire le point
Cela paraît une évidence, mais c’est essentiel : reconnaître que vous êtes victime du syndrome de l’imposteur vous aidera à le combattre. « Il s'agit tout d’abord de circonscrire le problème afin de lui donner des contours et de le relativiser, estime Virginie Boutin. Demandez-vous dans quel(s) domaine(s) il s’incruste. Réfléchissez ensuite aux problèmes que cela vous pose. Si vous continuez à avancer dans la vie en ressentant un inconfort, la crainte d'être "démasqué" juste après une prise de poste par exemple, c’est moins handicapant que si vous n’envoyez pas du tout de candidatures tellement la peur est forte. » Faites le point sur la gravité de votre syndrome : à quel point vous pose-t-il problème ? Qu'est-ce qu'il empêche ? Combien de temps cela peut-il encore durer ?
À éviter. « Ne prenez surtout pas l'habitude d'éviter toute activité inconnue, prévient Virginie Boutin. Moins on se confronte au "risque", plus on nourrit le sentiment d'illégitimité. C’est un horrible cercle vicieux. »
2° Faire taire votre voix intérieure
Le syndrome de l’imposteur est largement lié à votre propension à vous parler à vous-même. La prochaine fois que votre petite voix se met à dénigrer vos capacités et vos résultats, faites-la taire ! Comment ? En vous arrêtant sur vos réussites. « Quand j’étais présidente de l’US Ivry handball, un club professionnel masculin, afin de me persuader que je méritais ma place, je relisais souvent mon CV, raconte Béatrice Barbusse, sociologue et auteure du livre
Du sexisme dans le sport (Anamosa). Cela me permettait d’objectiver mes compétences et donc de me sentir plus légitime. Une manière de me rappeler mon parcours et tout ce que j’avais déjà réussi à accomplir dans ma carrière. » Autre idée : confiez vos doutes à vos proches. Ils vous soutiendront et vous aideront à être plus objectif, à avoir davantage confiance en vous. « L’entourage est une vraie force, confirme Béatrice Barbusse. N’ayez pas peur d’évoquer avec eux vos ressentis subjectifs. Ils vous apporteront un autre regard. » Et surtout,
acceptez leurs compliments.
À éviter. Le repli sur soi. Si vous taisez votre sentiment d’illégitimité, ce qui est très souvent le cas, personne ne pourra le deviner et donc vous aider.
3° Conserver des traces de vos succès
Votre nouvel meilleur ami ? Votre carnet de réussites et de compliments. « Accumuler les preuves de vos compétences et de vos talents devrait vous faire beaucoup de bien, explique Kévin Chassangre. Prenez l’habitude de récolter les ressentis des autres par rapport à votre travail et de les noter dans votre carnet. » Dans le même esprit, chaque fois que vous recevez un email de félicitations, collez-le dedans. Dès que l’angoisse monte ou que vous avez l’impression de n’être bon à rien, replongez dans votre carnet pour faire le plein de confiance.
À éviter. Se focaliser seulement sur le négatif. Vous avez toujours des choses positives à tirer de vos expériences, même de vos échecs !